Cet article est le premier d’une série de 3 qui servent à présenter les bases de l’écriture de manière complète et logique.

Si vous êtes ici, c’est que comme un Français sur deux, vous rêvez d’écrire un roman. Vous avez envie de tenir un jour entre vos mains ce livre qui vous tient tant à cœur et de feuilleter ses pages. Vous avez envie de le montrer à vos proches et de voir leur réaction quand ils découvriront votre nom sur la couverture.

Alors vous vous êtes renseigné. Vous avez parcouru tous les sites qui parlent d’écriture et peut-être même acheté quelques livres sur le sujet. Mais vous êtes noyé sous les informations. Qui croire ? Comment faire le tri ?

Au bout du compte, vous n’êtes pas plus avancé. Vous en savez plus qu’avant, mais vous vous sentez toujours perdu et tous les conseils vous semblent bien loin quand vous êtes seul face à votre page blanche. Peut-être même que vous avez déjà essayé de vous lancer et que votre manuscrit, à jamais inachevé, traîne dans un dossier obscur de votre ordinateur.

Votre problème ? Vous n’avez pas de méthode. Tout ce que vous avez, c’est une liste d’astuces indépendantes qui n’ont pas été pensées pour fonctionner ensemble. Pire, parfois elles sont même contradictoires, d’où votre sentiment de confusion.

Pour écrire un roman, il faut une méthode, où chaque conseil fonctionne en relation avec les autres et où aucune étape n’est négligée.

L’objectif de cette série d’articles est de vous guider pas à pas dans l’écriture de votre premier roman afin que vous puissiez aborder sereinement et avec confiance cette tâche difficile.

Une méthode universelle ?

Vous l’entendrez souvent, il y a autant de manières d’écrire que d’écrivains. Mais certains prétendent que puisqu’il n’existe pas de méthode universelle pour écrire un roman, il serait inutile de s’inspirer des méthodes des autres.

C’est totalement faux, à plus forte raison quand on débute. Un novice a besoin de repères et une méthode cohérente et complète, même si elle ne lui convient pas à 100%, pourra toujours lui servir toujours de point de départ. Dire le contraire revient un peu à lancer un « débrouille-toi ».

Ensuite, ce n’est pas parce que chacun écrit à sa manière que les auteurs ne se rejoignent pas. Il y a quand même des principes qui fonctionnent chez la majorité des écrivains, et s’en priver parce qu’il existe des exceptions n’a aucun sens.

D’autres diront qu’en littérature, il n’existe pas de recette miracle, et je serai d’accord avec eux. Mon but n’est pas de prétendre qu’en suivant cette méthode, vous allez écrire le prochain best-seller, mais de proposer un cadre, un ensemble de principes sur lesquels s’appuyer pour venir à bout de son premier roman.

Enfin, certains martèleront qu’il n’existe pas de règles, ce qui rejoint un peu le « chacun fait comme il veut ». Ça dépend. Il n’y a pas de règles pour écrire un Proust ou un Céline, mais il y a tout de même des « règles » qui permettent d’obtenir un livre plaisant et réussi. Encore une fois, des exceptions à ces règles ne suffisent pas à les invalider. McCarthy écrit ses dialogues sans incises et sans tirets, je ne vais pas pour autant recommander aux débutants de l’imiter au motif que c’est un grand auteur.

Ce qu’il faut vraiment pour commencer

À en croire ce qu’on peut trouver sur internet, il faudrait avoir des tiroirs qui débordent de notes et de plans avant d’avoir le droit d’écrire la moindre ligne. Certains conseillent de réaliser un plan détaillé, parfois à la scène près, de compléter des fiches personnage et même des fiches lieu, de dresser une ligne du temps ou de créer un plan d’ensemble avec des post-it sur des panneaux en liège. Et je ne parle pas des cartes, langues construites, races, cultures, religions, technologies et civilisation pour les auteurs de fantasy et science-fiction… Tout ça avant de commencer.

Écrire un roman est déjà une tâche titanesque et on n’en prend la mesure que quand on s’est réellement essayé à l’exercice. Si on fait croire aux novices qu’il faut une préparation plus longue que le roman avant d’attaquer le chapitre un, beaucoup vont se décourager.

Et ce serait peut-être un mal nécessaire, si c’était vrai. Mais ça ne l’est pas. Si une longue préparation peut aider certains, elle est aussi totalement inutile pour d’autres, qui se sentent malgré tout obligés de suivre la vague parce qu’ils voient tout le monde faire comme ça. Ils se forcent, persuadés que c’est la seule manière de faire, et vont à l’encontre de leur instinct.

Pire encore : pour certains, trop de préparation est contre-productif. Ils finissent par se braquer, convaincus qu’ils doivent avoir tout prévu dans les moindres détails avant d’écrire, sinon tout le roman va finir par s’écrouler.

La préparation est une affaire de sensibilité. Certains en ont besoin, d’autres non, à des degrés divers. L’essentiel est de déterminer votre manière de faire et non celle qu’on cherche à vous imposer.

À quel point devez-vous préparer votre roman ?

Je suis quelqu’un qui déteste improviser. Je n’aime pas l’imprévu, parce que j’ai peur de ce qui peut arriver. Quand j’ai débuté l’écriture, j’étais donc du côté de ceux qui veulent tout préparer. Mais j’ai changé, et j’ai d’excellentes raisons.

Je sais ce que c’est. La peur d’écrire deux cents pages avant de se rendre compte que l’intrigue ne tient pas la route. La peur de découvrir un peu trop tard que le rythme est mal maîtrisé ou que les personnages n’ont aucune épaisseur, ou qu’on ne sait pas comment boucler.

C’est pour cette raison qu’on veut préparer un roman : pour éviter les mauvaises surprises. Avoir un plan, c’est rassurant. On sait qu’on n’a plus qu’à le suivre, plus qu’à « mettre en roman » et tout ira bien. Si certains points sont encore incertains, l’intrigue, elle, est au moins validée à l’avance. Mais est-ce que c’est toujours vrai ?

Beaucoup, et j’étais également de ceux-là, ne se rendent pas compte que la véritable raison pour laquelle ils continuent de programmer, planifier et structurer, est qu’ils ont tout simplement peur du moment où ils devront se lancer.

C’est comme à la piscine. Oui, plonger la tête la première est risqué, mais on sait tous que celui qui se mouille la nuque depuis un quart d’heure n’entrera pas dans l’eau.

Mon but n’est pas de vous convaincre de tout arrêter et de vous jeter à l’eau sans réfléchir. Je ne dis pas que la préparation est inutile. Je dis que beaucoup de débutants ont si peur qu’ils veulent trop se préparer, ce qui n’est pas la même chose.

Être trop organisé

Oui, on peut être trop préparé. On peut en faire trop. Passer des heures sur une scène qui ne verra finalement jamais le jour. Passer des semaines à imaginer un univers avant de se rendre compte que l’histoire devrait avoir lieu ailleurs. Noircir des pages de notes sur le passé d’un personnage secondaire qui ne sera finalement pas inclus dans le roman.

Comme on le verra plus loin, on ne peut pas tout prévoir. Il arrive un moment, après plusieurs semaines ou mois d’écriture, où on se retrouve à devoir décider entre suivre son plan et laisser le récit se dérouler naturellement.

La surprise n’est pas nécessairement quelque chose de négatif. Un personnage qui prend vie et fait quelque chose d’imprévu, une sous-intrigue qui prend de l’ampleur, un personnage secondaire qui passe au premier plan, ce sont autant d’imprévus qui ne doivent pas être des mauvaises nouvelles. Au contraire, ils font partie du plaisir d’écrire. Ils constituent justement ce qui différencie un roman d’un manuel d’utilisation.

Quel est le niveau de préparation minimum ?

Brisons un mythe : il n’y en pas. Certains sont capables d’écrire une excellente histoire en partant de rien. Pas de plan. Aucune idée des personnages. Le lieu est improvisé. Chaque scène est une trouvaille spontanée. Et ça marche.

Bien sûr, ça ne veut pas dire que c’est le cas pour tout le monde. Mais ces auteurs sont la preuve qu’il n’existe pas de seuil minimum. Le niveau de préparation qu’on vous recommande est très probablement supérieur à ce dont vous avez réellement besoin.

Pour moi, se lancer à l’aveuglette est dangereux. Mais perdre du temps dans une planification démesurée l’est tout autant. Je crois qu’il existe trois ingrédients qui permettent de limiter les risques tout en permettant une souplesse appréciable. Ces fondamentaux sont – comble de l’ironie – très rarement mis en avant par les ayatollahs du plan détaillé.

Revenir aux fondamentaux

  • Une prémisse
  • Des personnages
  • Une fin

Ce sont les trois éléments de base pour se lancer (selon moi). Mon intention n’est pas de vous dire de vous limiter à ces trois-là, ni de les faire passer pour indispensables. Pour moi, ils réduisent simplement les risques de se planter, c’est tout.

Si vous voulez planifier, vous pouvez, mais vous n’êtes pas obligé. Je suis la preuve vivante qu’on peut écrire sans planifier chaque scène, et j’ai un carnet d’adresses rempli d’écrivains qui fonctionnent de la même manière. Ne laissez pas la peur d’échouer devenir une excuse pour surpréparer votre roman.

Et les recherches, alors ?

Certains ancrent leur histoire dans une période historique particulière, par exemple le Moyen-Âge. D’autres doivent se renseigner sur les procédures légales, notamment ceux qui écrivent du policier ou du thriller. D’autres encore vont développer leur propre monde imaginaire. Tout cela nécessite des recherches. Mais les recherches sont la meilleure excuse pour ne jamais commencer. Il y a toujours un détail à ajouter, toujours une nouvelle idée à inclure, une vérification supplémentaire à effectuer.

Vous devriez vous limiter au minimum qu’il vous faut pour commencer, tout simplement parce que les recherches ne s’arrêtent pas au moment de poser la première ligne. Elles continuent tout au long du processus d’écriture et c’est pour cette raison que vous ne devez pas vous mettre en tête de commencer à écrire une fois les recherches terminées. Elles ne seront jamais terminées.

Toutefois, ça ne veut pas dire qu’elles doivent être bâclées. Surtout si vous écrivez sur des sujets sensibles, faites votre travail correctement et maîtrisez votre thématique. Le retour de flamme serait dévastateur.

La prémisse : travailler l’idée de départ

La prémisse est l’idée principale de votre roman, et le premier ingrédient de la préparation. C’est l’histoire résumée en quelques lignes, voire en une seule. Si vous deviez raconter rapidement votre roman à un inconnu, c’est ce que vous lui diriez.

L’importance de la prémisse

Pourquoi faut-il absolument une bonne prémisse ?

Tout simplement parce qu’elle est la raison pour laquelle le lecteur appréciera ou non votre livre. Elle est son essence.

Les débutants ont tendance à la négliger, parce qu’ils se persuadent qu’un autre aspect de l’écriture les sauvera. La prémisse est un peu banale, mais les personnages, eux, sont fantastiques. La prémisse n’est pas très originale, mais l’intrigue complexe est vraiment prenante. La prémisse n’est pas engageante, mais le suspense est bien maîtrisé.

Le lecteur s’en fout.

Désolé d’être aussi direct, mais c’est la vérité. Si vous ne parvenez pas à donner envie de lire votre livre avec votre prémisse, alors vous partez sur de très mauvaises bases.

Mais certains best-sellers ont des prémisses plutôt banales, me répondrez-vous. C’est vrai. Mais est-ce un bon prétexte ? Personne ne vous connaît, qui va vouloir lire votre livre si le résumé n’est pas intéressant ? Qui va prendre le risque de lire 300 pages d’un auteur inconnu si la prémisse n’est pas convaincante ? Personne.

Un phare pour vous guider

Il va arriver un moment où vous serez perdu. Ça nous arrive à tous. Vous perdrez foi en votre histoire, vous aurez l’impression qu’elle n’intéressera personne. Vous serez tellement habitué à ses personnages, vous connaîtrez tellement bien son intrigue, que l’effet de nouveauté aura totalement disparu. Votre histoire ne vous enchantera plus et vous aurez alors l’impression que vos lecteurs ressentiront la même chose. À ce moment-là, croyez-moi, vous serez très heureux d’avoir une prémisse un béton pour vous redonner confiance.

Si au contraire vous l’avez négligée, vous verrez alors votre monde s’effriter autour de vous et tous vos efforts vont sembleront chaque jour un peu plus désespérés et inutiles.

Rappelez-vous une réalité douloureuse : on peut toujours corriger un mauvais chapitre ou rectifier une intrigue, mais on ne sauve pas une mauvaise prémisse. À moins de tout recommencer depuis le début.

Et si je n’ai pas d’idée ?

Si vous ne trouvez pas l’inspiration, il y a deux méthodes qui ont fait leurs preuves.

La première consiste à partir d’un fait divers, comme l’ont fait quantité de romanciers avant vous.

La seconde est de partir d’une histoire que vous avez appréciée et de la réduire à son squelette, pour ensuite vous la réapproprier. Pensez par exemple au Roi Lion, inspiré de Hamlet de Shakespeare.

Explorer les idées des autres à moindre frais

Une astuce que j’ai découverte il y a quelques années quand j’étais en panne d’inspiration consiste à éplucher les résumés de livres, de séries ou de films sur Wikipédia. C’est une mine d’or.

Pensez-y : alors qu’il faudrait une cinquantaine d’heures de travail pour venir à bout de seulement quatre livres de 600 pages, il vous ne vous faudra que quelques minutes pour en lire le résumé. À ce stade, seule l’idée de départ vous intéresse, vous n’avez pas besoin de lire le roman en entier pour savoir si elle vous inspire.

Voici quelques exemples d’excellentes prémisses à aller consulter :

  • The Revenant
  • No country for old men
  • Inception
  • Misery

La fin

La fin correspond simplement à la manière dont vous voulez que votre histoire se termine.

Certains préfèrent une fin heureuse, d’autres une fin tragique. Il n’y a pas de bonne réponse. Sachez toutefois que les fins heureuses ont plus la cote, même dans les histoires sombres. Les fins tragiques sont généralement considérées comme plus adultes et plus réalistes, mais tout dépend de l’histoire, naturellement.

Avoir la fin en tête vous aidera à garder le cap. Si vous avez bien fait votre travail, elle devrait découler logiquement de votre prémisse.

Elle n’a pas besoin d’être définitive. Si, en cours de route, vous avez une meilleure idée, rien ne vous empêche d’en changer. Mais attention à ne pas perturber toute votre histoire. Le but n’est pas de tout réécrire depuis le début.

La raison pour laquelle vous devez avoir une fin en tête avant de commencer à écrire est simplement que vous risquez de vous perdre en cours de route si vous n’en avez pas. Beaucoup d’auteurs se lancent dans l’écriture avec « une idée », mais ils ne savent pas encore où elle va les mener. Si cette approche semble plus naturelle, elle a tout de même tendance à produire des récits décousus et remplis de digressions, qui manquent cruellement de structure. Avoir la fin en tête vous évitera ce genre de problèmes.

Conclusion

Nous nous arrêterons ici pour aujourd’hui, parce que ça fait déjà pas mal d’informations à ingurgiter. Prenez le temps de relire cet article si nécessaire et ne passez à la suite que quand vous vous sentez prêts. Ne brûlez pas les étapes. Dans le prochain article, on attaque les personnages!

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